mercredi 17 février 2016

Prologue

11 septembre 2001, les tours enflammées étouffaient dans l'épaisse fumée noire qui envahissait le ciel effrayé de Manhattan. Puis elles vacillaient lentement tel un boxeur pris dans le vertige des coups décisifs de son adversaire. Pour s'écrouler sur elles-mêmes, après avoir donné l'illusion de résister à cette menace étrange qui venait d'outre-monde. 

A des milliers de kilomètres de l'enfer new-yorkais, Yasmine, du haut de ses quatre ans riait, se roulait par terre, courait... dans l'arène familiale. Ses parents, ses tantes, ses cousines et ses cousins entonnaient d'une seule voix un chaud et affectueux : "happy birthday to you !" 

Été 2013. Dans la moiteur de cette étouffante après-midi d'août, Aziz et Yasmine revenaient de la plage. Le bel éphèbe brun était fou amoureux de cette superbe créature venue tout droit du monde des mille et une nuits. Yasmine était telle une princesse andalouse, les cheveux noirs ondulés sur ses épaules, une silhouette de sirène enveloppée dans un deux pièces qui couvrait à peine ses courbes parfaitement dessinées par le Dieu des Cieux et de L'Univers. Et des gouttelettes d'eau salées ruisselaient encore sur sa peau bronzée. Les deux amoureux étouffaient à peine quelques rires complices en arpentant rapidement les ruelles silencieuses de Sidi Bou Said pour rejoindre à la hâte le studio que loue Aziz et qui lui sert aussi d'atelier de peinture. Cette année, le mois de ramadan était inhabituellement rude à cause de cette vague de chaleur exceptionnelle et les habitants du village profitaient de la sieste avant la rupture du jeûne. 

Le petit havre de paix des deux tourtereaux était particulièrement frais et nageait dans un silence quasi religieux interrompu de temps à autre par le chant strident de quelques cigales téméraires. Aziz tendit une bière glaçante à Yasmine qui se débarrassait déjà de son bikini mouillé. L'homme, déjà passablement étourdi par la chaleur se glissa rapidement à côté de sa bien-aimée pour lui susurrer quelques mots tendres dans son oreille. Puis, d'un geste rapide mais tendre s'employa à écarter ses longues boucles noires sur son cou pour la couvrir de baisers salés. Yasmine commençait à se laisser aller à son homme qui s'empressa de caresser chaque centimètre carré de son corps humide. Ses grandes mains l'enveloppaient  fermement pendant que sa langue charnue traçait de longues lignes sur sa peau tremblante. Yasmine, grisée par le désir, s'écarta lentement pour laisser son étalon se poser en elle...

Aziz avalait une bière pendant que Yasmine jouait à faire de grands cercles de fumée depuis sa cigarette. Sur l'écran de télévision défilaient les images de l'exode des habitants de la ville de Rakka fuyant les djihadistes de l'état islamique. Les combattants de l'EI avaient fait de cette province syrienne leur bastion à partir duquel ils ont entrepris de conquérir le pays.

Yasmine, jusque-là perdue dans son nuage de fumée s'exclama : "c'est terrible ce qui se passe là-bas. Ce boucher de Bachar les a tous exterminés !" Aziz, leva les yeux en fronçant les sourcils : "Entre le boucher et le diable, je préfère le premier. Le diable, lui, ne meurt jamais." "Et que fais-tu de ces pauvres innocents bombardés par Bachar ?!" Se révolta brusquement Yasmine. "Pure propagande." Répondit en haussant les épaules Aziz. Yasmine baissa la tête d'un air triste. Aziz s'approcha d'elle délicatement en lui chuchotant dans le cou :"je t'aime bébé. Ce monde est cruel mais ce qui compte c'est nous, c'est l'amour..."

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